Quand le cancer révèle des passions

Publié le 26 février 2018 - Mis à jour le 11 juin 2020
Dans le cadre de la Semaine nationale de lutte contre le cancer, du 14 au 20 mars 2018, nous avons rencontré Séverine Egéa, une Saint-Bricienne atteinte d’un cancer du sein en 2012, dont la pâtisserie est devenue sa thérapie.
« Le 1er juin 2012, je m’aperçois que j’ai une boule sur le sein. Et là, c’est le début de l’enfer… » se rappelle Séverine Egéa, avant de poursuivre : « Le 27 juin, après toute une série d’examens, j’apprends que c’est un cancer du sein triple négatif, une version agressive du cancer sur lequel il faut agir vite. » Elle suit alors des traitements jusqu’en mars 2013. « Pour la convalescence, mon oncologue m’a conseillé de m’occuper l’esprit pour éviter de faire une dépression nerveuse » raconte cette maman de deux enfants. Trop faible pour des activités extérieures, elle suit le conseil de son mari : créer un blog. « Je cuisinais beaucoup. Les copines me demandaient souvent les recettes. Mais cela aurait été trop « facile » de le consacrer à la cuisine puisque ma mère m’avait tout appris : manger frais, varié, local et toujours avec des produits de saison. En revanche, la pâtisserie était un vrai challenge. Je ne pâtissais pas du tout, hormis les classiques. » C’est ainsi que Délices et pâtisseries est né.
Transmettre et partager sa passion
Pendant son arrêt maladie, elle pâtisse du matin au soir ou plutôt du soir au matin, vu qu’elle est devenue insomniaque. Elle fait goûter ses créations à sa famille, ses amis, ses voisins et ses collègues. Chaque jour, elle publie une recette. Sur son blog, on trouve un nombre incalculable de recettes : du fondant au chocolat au clafoutis aux abricots en passant par les financiers à la noisette et aux myrtilles. Suivie rapidement par des milliers de followers (aujourd’hui, elle est suivie par 15 000 followers), elle donne des conseils pour réaliser une rose en pâte à sucre, tempérer son chocolat ou quoi faire avec des bananes trop mûres... La blogueuse poste aussi ses coups de cœur, ses bonnes adresses de restaurants et des jeux concours.
Elle se lance ensuite sur les réseaux sociaux : Facebook, Instagram et Twitter. Sa communauté s’est ainsi vite agrandie. « Mon but est surtout de fidéliser mes followers. Je ne souhaite pas développer ma communauté n’importe comment. Des profils non actifs n’ont pas d’intérêt. » explique cette ingénieure commerciale de la finance.
Quelques mois après le lancement de son blog, en 2014, la quadragénaire participe à l’émission de la chaîne de télévision Téva : le Gâteau de mes rêves . Le principe était de proposer une recette au chef pâtissier Jonathan Blot (Acide Macaron) et de la revisiter ensemble. « Je m’étais mise une pression de fou en lui proposant des macarons, comme c’est sa spécialité. » se souvient-elle. Elle était surtout très impressionnée qu’il vienne dans sa cuisine, à Saint-Brice, pour réaliser avec elle des mignardises.
En 2016, Séverine Egéa participe à un concours amateur de la meilleure mousse au chocolat. Elle obtient malheureusement une médaille en chocolat en terminant quatrième, au pied du podium.
Elle a également été sollicitée par la chaîne YouTube MySaveurTV pour réaliser des vidéos. On peut la voir notamment réaliser un cake aux pommes avec une touche de vanille et des éclats de caramel.
Puis, elle passe un cran au-dessus en obtenant son CAP de pâtisserie. Les portes des concours amateurs se sont désormais refermées.
« Le blog, c’est ma thérapie »
Lorsqu’on lui pose la question « Qu’est-ce que le blog culinaire vous a apporté ?, la réponse fuse : « Le blog, c’est ma thérapie. Il m’a permis de sortir de la dépression en rencontrant des gens formidables. Par exemple, sur un salon dédié aux blogueurs culinaires, j’ai rencontré le chef Philippe Conticini. Toujours souriant, il est tout le temps disponible, discute avec toi, te donne des conseils… Je crois qu’il ne se rend pas compte à quel point c’est une icône de la pâtisserie. Il reste très accessible. Autre exemple, j’ai récemment croisé Norbert Tarayre (NDLR : ancien candidat de l’émission télévisée Top Chef de M6, cuisinier et animateur de télé) . Je lui ai demandé un conseil pour réaliser du levain. Très ouvert, il m’a donné un tas d’astuces. » Elle poursuit : J’ai également appris plein de choses en participant à des ateliers de cuisine et pâtisserie. » Enfin, et surtout, l’essentiel, pour elle, est l’échange et le partage. Que ce soit avec sa communauté : « Cela fait très plaisir d’entendre « J’ai essayé ta recette et c’était top ! » ou d’autres passionnés de pâtisserie comme Leïla Albert du blog Sikla, une candidate du concours Le meilleur pâtissier , une émission diffusée sur M6. Elle donne aussi des cours à domicile, où elle apporte son matériel et les ingrédients. « C’est plus facile de reproduire une recette dans un environnement qu’on connait » précise-t-elle.
Des partenariats choisis avec précision
Cuisineshop, Zôdio, Magimix… Comme la majorité des influenceurs, Séverine Egéa a créé des partenariats avec des marques. « Parce qu’un blog culinaire coûte cher. Il faut créer les recettes, les tester et les améliorer. À cela, il faut ajouter le matériel de pâtisserie et photo. Quand vous pouvez avoir l’appui d’une marque pour vous aider à assouvir votre passion, vous n’allez pas refuser ». Intègre, la blogueuse ne veut collaborer qu’avec des marques en qui elle a confiance. « J’ai refusé de signer avec certaines grandes marques . » Aujourd’hui, elle représente plusieurs sociétés. L’une d’entre-elles est une entreprise familiale de couteaux, fabriqués en France, sur laquelle elle a une visibilité sur ce qu’ils font. Concrètement, le partenariat se traduit de plusieurs manières : soit la marque lui donne du matériel, soit elle est embauchée pour créer une recette. Cela lui permet aussi de tester des produits avant qu’ils soient lancés sur le marché.
Ses projets ?
Pour le moment, elle n’a pas l’envie de devenir blogueuse professionnelle. « Je n’ai pas la santé pour suivre le rythme, d’autant que j’ai repris mon travail à 80 %. Cela se ressent, d’ailleurs, car je publie beaucoup moins qu’avant . En moyenne, deux fois par mois. » Sa priorité ? « Rien n’est plus important que ma vie de famille. » Pour autant, elle est très active sur Instagram : publier une image est moins chronophage que la rédaction d’un article. Elle est encore peu suivie sur ce réseau mais sa présence est encore récente. « C’est beaucoup plus compliqué d’acquérir une communauté ». Par ailleurs, elle aimerait bien créer une chaîne YouTube mais « il faut du temps et savoir monter des vidéos. » Aujourd’hui, cette gourmande de la vie trouve son plaisir en rajoutant sa petite touche dans les recettes qu’elles réalisent. « J’aime être créative » ajoute-t-elle. « Mon rêve serait d’ouvrir un petit salon de thé moderne et intimiste , et surtout pas guindé ! »
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Une boulimique de la vie
En attendant, Séverine Egéa, qui a désormais la pâtisserie dans la peau (la blogueuse s’est faite tatouer un cupcake sur son bras droit), espère que cet article banalisera davantage le cancer : « J’en ai marre que le cancer soit tabou ». Elle confie : « Le cancer, je ne m’y attendais pas du tout. Je n’avais aucun antécédent dans ma famille. Je ne fumais plus depuis des années, pratiquais beaucoup de sport et je mangeais équilibré. Si mon exemple pouvait inciter les lecteurs à se faire dépister, même avant cinquante ans , ou au moins à devenir plus vigilant. »
Toujours positive, elle déborde d’envies. « Je suis devenue une hyperactive. Je le dois pour mes amies que j’ai perdues à cause de cette maladie. Jamais je ne serais une victime. Parce que sans le cancer, je n’aurais pas fait tout ce parcours, dont je suis tellement fière. » Par ailleurs, Séverine Egéa recherche également des partenaires avec qui elle pourrait s’investir pour lutter contre le cancer du sein. N’hésitez pas à la contacter.
Infos pratiques
Blog : www.delicesetpatisseries.com
Facebook : @delicesetpatisseries
Instagram : @delices_et_patisseries
Twitter : @Delicesetpatiss
Questions
Vos pâtissiers préférés ?
Christophe Michalak, Kevin Lacote et tellement d’autres…
Votre meilleur souvenir ?
J’étais invitée par La Mère Poulard à un concours entre blogueurs culinaires au Mont Saint-Michel. Deux chefs jouaient le rôle des commis. C’était génial de se dire qu’on cuisinait dans ce célèbre restaurant. On a eu droit à la visite du Mont Saint-Michel et de sa baie. C’était fantastique !
Votre pâtisserie préférée ?
Le fraisier (avec la pâte d’amande) était mon gâteau préféré quand j’étais petite. J’y avais droit à chaque anniversaire. À présent, le Paris-Brest est devenu mon préféré. Celui de Conticini est à tomber par terre. Je suis très traditionnelle...
Votre plus belle réalisation ?
La bûche de Noël de Christophe Felder : l’Alcantara. C’est très technique sur une journée. Ça aurait été plus simple de la réaliser sur plusieurs jours…
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